"La planification familiale est un droit humain". C’est sous ce thème que la Mauritanie et le système des Nations Unies, notamment le Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA), ont célébré le 11 juillet 2018 la Journée mondiale de la Population, à l’heure où une nouvelle Politique nationale de la population est en cours d’élaboration pour répondre aux objectifs de la Stratégie de la croissance accélérée et de la prospérité partagée (SCAPP) qui définit la vision de la Mauritanie à l’horizon 2030.
Nouakchott a abrité mercredi 11 juillet 2018 la cérémonie commémorative de la Journée mondiale de la Population, célébrée cette année sous le thème "la planification familiale est un droit humain", et par laquelle l’Etat mauritanien, avec l’appui du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA), fait de la dimension démographique un levier incontournable pour la capture de son dividende démographique.
Bientôt une révision de la Politique nationale de population
Cette cérémonie a été émaillée par plusieurs communications, dont trois en étroite relation avec les questions de population. La première a été présentée par le Directeur des stratégies politiques au Ministère de l’Economie et des Finances, M.Mohamed Taghra qui a rappelé la vision générale de la SCAPP et ses objectifs, en lien avec la Politique nationale de population en cours de révision, après celle de 2005 et de 2012.
Il s’agit selon lui de tirer profit de la fenêtre d’opportunités qui s’est ouverte depuis 1988 pour la capture du dividende démographique, et dont la réalisation passera nécessairement selon lui par l’amélioration de la qualité de l’éducation, notamment celle des filles, l’autonomisation des femmes et des jeunes, l’amélioration et la disponibilité des services de santé, faisant ressortir le taux très élevé de la mortalité maternelle et infanto-juvénile, ainsi que du taux synthétique de fécondité. D’où, dira-t-il en substance, l’intérêt à intensifier les campagnes de sensibilisation en faveur de l’espacement des naissances, pour réduire de 25 à 30% le taux de mortalité maternelle. Il a indiqué dans ce cadre la création attendue d’un Observatoire du dividende démographique qui va assurer la veille sur les variables à prendre en compte.
La deuxième communication sur la "Planification familiale ou espacement de naissance en Mauritanie, avancées et perspectives" par M.Sidi Mohaled Abdel Aziz, Coordinateur du Programme national de la santé de la reproduction (PNSR), qui a fait ressortir les chiffres effrayants du taux de mortalité maternelle (582 pour 100.000 naissances vivantes), de la mortalité néonatale (29 pour 1.000) et de la mortalité infantile (52 pour 1.000). Selon lui, la prévalence contraceptive reste encore faible en Mauritanie, 17,8%, alors que les besoins non satisfaits en planification familiale sont de 33,6%, et l’indice synthétique de 5,1 enfants par femme.
Il a plaidé dans ce cadre pour le rétablissement de la ligne budgétaire allouée à la planification familiale, interrompue depuis 2015, ce qui prive selon lui la Mauritanie des financements extérieurs. Le Ministre des Finances aurait cependant promis, selon lui, de rétablir cette ligne budgétaire qui s’élevait avant sa suppression à 3 milliards UM. M.Sidi Mohamed Abdel Aziz a indiqué par ailleurs que malgré cette situation, la Mauritanie reste le seul pays de la région à offrir gratuitement les produits contraceptifs, soulignant que 60% des services de santé dans le pays offre une telle prestation, regrettant toutefois que les pilules représentent 50% des demandes au détriment des méthodes de longue durée, plus efficaces, mais qui intéressent moins de 10% des utilisatrices.
Il s’est cependant félicité des efforts fournis par l’Etat, à travers des interventions ciblées et périodiques dans le domaine de la santé de la reproduction, l’institution de journées spéciales de planification familiale, l’adoption d’une loi sur la santé de la reproduction, les nombreuses formations du personnel médical, notamment les sages-femmes et les prestataires, et tout récemment la formation avec Track20 pour la coordination et le suivi. Il a également annoncé la mise en œuvre d’un Plan d’action 2019-2023 pour le repositionnement de la planification familiale, avec l’implication des hommes, des jeunes et des adolescents.
Le DD et cette insaisissable fenêtre à capter
La troisième communication, "Profil démographique de la Mauritanie et la contribution du SWEDD dans la capture du dividende démographique (DD)" a permis au Coordinateur du Projet SWEDD, M.Mélaïnine Ould Eyih, d’indiquer le déséquilibre entre le nombre de consommateurs et le nombre de producteurs actifs, avec une consommation de la population improductive (les moins de 29 ans), dépassant 26,7% du PIB. Il a également mis en exergue les disparités genre en termes de consommation et de part dans le Revenu national, entre les femmes et les hommes, mais aussi des disparités spatiales entre ruraux et citadins.
Le SWEDD a contribué selon lui à encourager la scolarité des filles, avec le soutien apporté à 49.000 filles en classe d’examen (Brevet et Baccalauréat) en termes de cours de rattrapage, et les 2.600 bourses octroyées ainsi que les bus de transport mis à la disposition des élèves, mais aussi les 270 espaces sûrs en faveur de 6.500 femmes et jeunes filles.
Plusieurs autres communications ont été présentées, dont celle du Ministère des Affaires Islamiques qui trouve que l’ensemble des questions relatives à la santé de la reproduction, dont la planification familiale, trouve sa justification dans l’islam.
A noter que la cérémonie officielle de cette journée a été marquée par le discours du Secrétaire général du Ministère de l’Economie et des Finances, M.Mohamed Salem Ould Soueilem, qui a rappelé l’intérêt accordé par l’Etat mauritanien aux questions de population, citant la priorité qui lui est accordée dans la SCAPP et les efforts déployés depuis plus d’une décennie pour assurer le bien-être des citoyens ainsi que leur égal accès aux services sociaux de base, notamment l’éducation et la santé.
Auparavant, le Représentant de l’UNFPA en Mauritanie, M.Saidou Kaboré avait rappelé l’état alarmant des indicateurs démographiques (mortalité maternelle et infanto-juvénile), ainsi que les besoins non satisfaits en PF (+ de 33%), saluant au passage la volonté forte des pouvoirs publics mauritaniens de renverser la tendance, avant de livrer l’intégralité du message de la Directrice Exécutive de l’UNFPA, Mme Natalia Kanem, à l’occasion de la journée.
Cheikh Aïdara
http://lauthentic.info